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HUMAIN, TROP HUMAIN, DEUXIÈME PARTIE

lui est toujours demeurée et lui demeurera toujours étrangère ? — En effet, par là quelque chose de la caractéristique de cet homme est donné, mais le reflet de la nature ne dit pas que ce même homme, avec tous ses sentiments idylliques (et je ne dis pas « malgré eux »), pourrait fort bien être peu charitable, parcimonieux et présomptueux. Horace, qui s’entendait, à pareilles choses, a placé le sentiment le plus tendre pour la vie de campagne dans la bouche et dans l’âme d’un usurier romain avec le célèbre : « beatus ille qui procul negotiis ».

50.

Puissance sans victoires. — « La conviction la plus forte (celle de l’absolue non-liberté de la volonté humaine) est pourtant celle qui aboutit aux résultats les plus pauvres : car elle a toujours eu l’adversaire le plus fort, la vanité humaine.

51.

Joie et erreur. — L’un fait involontairement du bien à ses amis par toute sa nature, l’autre volontairement par des actes particuliers. Si le premier cas est considéré comme supérieur, c’est au second seulement que s’allie une bonne conscience et un sentiment de joie, — je veux dire la joie que procurent les bonnes œuvres, un sentiment qui repose sur la croyance que nous pouvons à volonté faire le bien ou le mal, c’est-à-dire sur une erreur.

52.

On a tort d’être injuste. — Une injustice que