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NOTES

parfois au milieu d’une discussion sur Parsifal, que c’est en somme moi qui mérite le reproche d’avoir donné cours à la haute opinion que l’on se fait sur la valeur de ce mouvement au point de vue de la culture. — J’ai plusieurs fois trouvé l’ouvrage faussement cité sous le titre de la re-naissance de la Tragédie dans la musique : on n’avait voulu voir là qu’une formule nouvelle pour l’art, les intentions, la tâche de Wagner, — on y oubliait ce que cet écrit cachait au fond d’important. Hellénisme et Pessimisme : c’eût été là un titre sans équivoque, car c’étaient les premiers enseignements sur la façon dont les Grecs vinrent à bout du pessimisme, de quelle manière ils le surmontèrent. — La tragédie précisément démontre que les Grecs n’étaient pas des pessimistes : Schopenhauer s’est mépris à leur sujet comme il s’est mépris en toutes choses. — Considérés avec quelque neutralité l’Origine de la Tragédie a l’air très inactuelle : on ne s’imaginerait pas en rêve qu’elle a été commencée pendant que tonnaient les canons de la bataille de Wœrth. J’ai médité ces problèmes sous les murs de Metz, pendant les froides nuits de septembre, au milieu des occupations que me donnait mon service d’ambulance et on serait plutôt tenté de croire que l’ouvrage remonte à cinquante ans plus loin. Il est indifférent au point de vue politique — « non-allemand », comme on dirait aujourd’hui — il sent l’hégélianisme d’une façon choquante et ce n’est que dans quelques formules qu’on lui trouve l’odeur de pompes funèbres particulière à Schopenhauer. Une « idée » — l’opposition entre dionysien et apollinien — traduite en métaphysique ; l’histoire elle-même envisagée comme évolution de cette « idée » ; l’opposition supprimée dans la tragédie et élevée à l’unité ; sous cette optique, des choses placées soudain les unes en face des autres qui ne s’étaient jamais vues de si près, éclairées et comprises les unes par les autres : l’Opéra par exemple et la Révolution. — Les deux innovations définitives du livre sont ; d’une part la compréhension du