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Page:Nietzsche - La Généalogie de la morale.djvu/141

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refoulé, rentré à l’intérieur, ne trouvant plus dès lors qu’à s’exercer et à s’épancher en lui-même, cet instinct, rien que cet instinct — nous l’avons déjà compris — fut au début la mauvaise conscience.

18.

Qu’on se garde toutefois de faire trop peu de cas de ce phénomène, puisque dès son début il nous apparaît laid et douloureux. Au fond c’est la même force active, que nous avons vue tout à l’heure opérant d’une façon grandiose chez ces artistes de la violence, chez ces organisateurs pour créer des États, la force qui, maintenant rapetissée et mesquine, se crée la mauvaise conscience, agissant à l’intérieur d’une façon rétrograde, « dans le labyrinthe du cœur », pour parler avec Goethe, pour s’édifier un idéal négatif, l’idéal négatif de cet instinct de liberté (ou, comme je dirais dans mon langage, de la volonté de puissance) : seulement la matière sur laquelle s’exerce la nature formatrice et dominatrice de cette force est ici l’homme même, son ancien moi animal — et non, comme dans le premier phénomène plus grandiose et plus frappant, l’autre homme, les autres hommes. Cette secrète violation de soi-même, cette