Page:Nietzsche - La Généalogie de la morale.djvu/174

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cien : il devenait maintenant un oracle, un prêtre, plus qu’un prêtre, une sorte de porte-parole de l’« essence » des choses, un téléphone de l’au-delà, — dès lors il ne parla plus seulement en musique, ce ventriloque de Dieu, — il parla en métaphysique : quoi d’étonnant s’il finit par parler un jour au moyen de l’idéal ascétique ?

6.

Schopenhauer a mis à profit la conception kantienne du problème esthétique, — quoiqu’il ne l’ait certainement pas regardée avec des yeux kantiens. Kant pensa faire honneur à l’art lorsque, parmi les prédicats du beau, il avantagea et mit en évidence ceux qui font l’honneur de la connaissance : l’impersonnalité et l’universalité. Ce n’est pas le lieu d’examiner ici si ce ne fut pas là une erreur capitale ; je veux seulement souligner ici que Kant, comme tous les philosophes, au lieu de viser le problème esthétique en se basant sur l’expérience de l’artiste (du créateur) n’a médité sur l’art et le beau qu’en « spectateur » et insensiblement a introduit le « spectateur » dans le concept « beau ». Si du