Page:Nietzsche - La Généalogie de la morale.djvu/188

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commode de l’obscurité, d’une certaine dépendance et d’un certain effacement : bien plus, il craint le trouble de la foudre, il s’effraie de l’insécurité d’un arbre trop isolé et trop exposé, sur quoi tout mauvais temps décharge son humeur, toute mauvaise humeur sa tempête. Son instinct « maternel », le secret amour de ce qui grandit en lui, lui conseille des conditions où l’on se décharge du devoir de prendre soin de soi, de même que l’instinct de la mère, chez la femme, a toujours maintenu la situation dépendante de la femme. Ils demandent enfin peu de chose, ces philosophes, leur devise est « celui qui possède est possédé » — : et cela, je ne saurais trop le répéter, non par vertu, par une volonté de frugalité et de simplicité qui aurait du mérite, mais parce que leur souverain maître l’exige avec sagesse, impérieusement : ce maître, qui n’a dans l’idée qu’une seule chose et qui n’assemble, qui n’épargne que pour cela, temps, force, amour, intérêt. Cette sorte d’hommes n’aime à être troublée ni par les amitiés, ni par les inimitiés : elle oublie et elle méprise aisément. Il lui semble de mauvais goût de jouer le martyr, de « souffrir pour la vérité » — elle laisse cela aux ambitieux et aux comédiens de l’esprit et à tous ceux qui ont du temps