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Page:Nietzsche - La Généalogie de la morale.djvu/206

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possible : comment donc ? ne serait-ce pas là châtrer l’intelligence ?…

13.

Mais revenons sur nos pas. Une telle contradiction de soi, comme elle semble se manifester chez l’ascète, « la vie contre la vie » — il est clair que c’est là, au point de vue physiologique et non plus psychologique, tout simplement une absurdité. Elle ne peut être qu’apparente ; ce doit être une sorte d’expression provisoire, une interprétation, une formule, un accommodement, un malentendu psychologique de quelque chose dont pendant longtemps on ne put comprendre la vraie nature, reconnaître la vraie essence, — un mot, rien qu’un mot, serré dans une vieille fissure de la connaissance humaine. Établissons brièvement la réalité des faits : l’idéal ascétique a sa source dans l’instinct prophylactique d’une vie dégénérescente qui cherche à se guérir, qui, par tous les moyens, s’efforce de se conserver, qui lutte pour l’existence ; il est l’indice d’une dépression et d’un épuisement physiologique partiels, contre lesquels se raidissent sans cesse les instincts les plus profonds et les plus