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PAR DELÀ LE BIEN ET LE MAL

vants et au personnel de l’université (exception faite des théologiens, dont l’existence et la possibilité donnent aux psychologues une énigme de plus en plus difficile à pénétrer). Parmi les hommes pieux, ou simplement favorables à l’Église, on se fait rarement une idée de ce qu’il faut de bonne volonté, on pourrait dire d’arbitraire, pour qu’aujourd’hui un savant allemand prenne au sérieux le problème de la religion ; de par toute sa profession (et, comme je l’ai indiqué, de par son activité professionnelle, à quoi le contraint sa conscience moderne), il incline à une sérénité supérieure, presque bienveillante, à l’égard de la religion, une sérénité à laquelle se mêle parfois un léger mépris, à cause de la « malpropreté d’esprit » qu’il suppose partout où l’on appartient encore à l’Église. Ce n’est qu’à l’aide de l’histoire (donc nullement par son expérience personnelle) que le savant arrive à considérer les religions avec une gravité respectueuse, à avoir pour elles certains égards ombrageux. Mais quand même il aurait élevé son sentiment pour la religion jusqu’à de la reconnaissance, personnellement, il ne se serait pas rapproché d’un pas de ce qui subsiste encore sous le nom d’Église ou de piété, peut-être, au contraire, s’en serait-il éloigné. L’indifférence pratique à l’égard des choses religieuses, au milieu de laquelle il naquit, où il fut élevé, se sublime généralement chez lui en circonspection et en propreté intellectuelle, lesquelles craignent le