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Page:Noël - Fin de vie (notes et souvenirs).djvu/96

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mêlée à la vie, à l’action, ressuscitant et dirigeant le monde.

Je l’ai planté, je l’ai vu naître,
Ce beau rosier…


Écoutant au piano chanter cette romance, je sens se réveiller mes sympathies d’autrefois pour Jean-Jacques. Il y a quelques semaines, au contraire, Flaubert me remettait par ses cris en désaccord avec le philosophe. J’ai dit quelque part de Jean-Jacques : « Pauvre âme qu’ébranlait un air de cornemuse… » ; mais ce mot est vrai de moi autant que de Jean-Jacques. Cet air si simple : Je l’ai planté… me fait subitement changer d’opinion sur son compte. S’il a été, sur nombre de points un sophiste déclamateur, sur combien d’autres lui sont échappés des cris venus des profondeurs de son être ! et que de chants délicieux dans sa prose !

Rousseau nous serait aujourd’hui plus sympathique s’il n’avait pas fait école (école politique) et s’il n’avait pas eu ses disciples pour l’amoindrir et faire oublier ce qu’il eut en lui d’humain.

Auteur du Contrat social, des Lettres de la montagne, il nous apparaît à travers l’étroitesse des sectaires ; mais si l’on s’en tient à lui seul, en ses heures inspirées, quel élan vrai, passionné, bienfaisant !