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NOA NOA

Et j’en crois cette folie religieuse et cette fureur amoureuse : Hina de l’amour et Hina de la mort sont bien la seule et la même Déesse, monstre au mufle de fauve avec des seins de femme.

J’écoute mes pensées, dans la nuit maintenant pleine, maintenant tenant calme, en marchant sur le rivage, parmi l’air tout chargé encore d’effluves humains et végétaux. Les fleurs sont mortes, foulées aux pieds des amants. Je hume voluptueusement ce puissant arôme, ce dictame concerté par la mort et l’amour.

Sans hâte, je regagne ma case. Déjà l’orient se colore, et, là haut, comme une émeraude immense, la Forêt, dans une apothéose verte, brille confusément de tous ses feuillages receleurs d’éternelles clartés, jusqu’à mi-côte de l’Aroraï, la cime nue, solitaire, triste, — où Taaroa veille.