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NOA NOA

Flots, ô forêts, ô fleurs folles d’êtres vivantes, et toi, race dorée : ton âme, une fleur belle aussi, vaste, odorante, généreuse, je l’ai désirée comme la seule vengeance !

Me diras-tu ton mystère, un jour !

— Ah ! loin de la ville, peut-être dans le libre rire des pêcheurs dorés ! Ah ! loin de la ville, peut-être dans le libre baiser des amantes dorées, au bord de la mer !

Loin de la ville ; vers la mer ! Vers la mer où mourront les rumeurs de la ville et du passé ! Vers la mer, où, dans le soir, un vivo sauvage chante doucement !

Mais, hâtons-nous, le chant aussi du vivo va mourir, et la voix de la ville et du passé le menace : elle monte, elle couvre à demi déjà la chanson grêle du vivo, la chanson frêle du bord de la mer.

Que triste le vent gémit dans l’arbre, dans les branches noires et mortes de l’arbre dont les racines maudites sont en moi, dans l’arbre de la ville et du passé !

Vengeance et renaissance ! Liberté ! Future vigueur, ô vivo !

O vivo : ignorer tout ce que tu ne sais pas.

Ne m’interroge plus.

Quand tu m’auras enseigne ta toute-sciente ignorance je pourrai te répondre : tu m’auras dit ton secret.

Je viens à toi, docile, ô maître d’ignorantes et de simplicité,