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Page:Noailles - Derniers vers, 1933.djvu/70

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Pareil aux autres, — plus nostalgique, et rêvant
À l’odeur de la Corse, à ses cloches d’églises,
Attentif, studieux, déchiffrant les savants,
Lisant la Nouvelle Héloïse.

Vous-même, qui portiez ce destin sans pareil,
N’en pouviez rien savoir ! — Jeune homme maigre et leste,
Profil d’aigle à jamais gravé sur le soleil,
Peut-être fûtes-vous modeste !

Vos deux noms familiers et toujours inouïs,
Sans surprendre épandaient leurs ineffables ondes :
L’un tressaillant et mince, et l’autre épanoui
Comme l’immensité du monde !

Vous viviez, vous parliez, vos gestes, votre accent
Ne dérangeaient pas l’air où se meuvent les astres,
Votre main, sans stupeur, sentait battre ce sang
Plein de triomphe et de désastres.

Des villes et des bourgs, des plaines, des hameaux
Respiraient calmement sans pressentir l’Histoire !
— Ô matins de Turin, soirs de Millesimo,
Adolescence de la gloire !