Page:Noailles - La Nouvelle Espérance, 1903.djvu/17

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Le repas terminé, Sabine et M. de Fontenay montèrent à une chambre large et confuse qu’on appelait l’atelier, où la jeune femme s’étendit sur un divan, tandis que son mari, ayant bu son café et fumé sa cigarette, lui exposait les plans de sa journée et prenait tendrement congé d’elle.

À la fois active et dolente, Sabine passait son temps là, s’asseyant, se relevant, ouvrant et fermant les livres, souvent étendue sur le divan de soie, se sentant envahie d’une langueur contente où entraient de l’insensibilité fine et vivante, une volupté de respirer l’heure plane et paisible, et un peu de la peur de mourir.

Son être fatigué des vives passions de l’enfance, des hasards d’un mariage hâtif, des douleurs de la maternité malheureuse, se reposait ainsi au creux des après-midi molles, bercé du plaisir de vivre faiblement à la sensuelle crainte de la mort.

Sabine se représentait le plaisir et la mort d’une manière aiguë et simple, par le goût qu’elle avait de la tiédeur et par la peur du frisson. Ainsi alanguie pendant des heures, elle