Page:Noailles - La Nouvelle Espérance, 1903.djvu/64

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

est vraiment de la conque d’Aphrodite qu’est sortie notre époque parfumée, amoureuse et divine.

» Nous menions, au son des clavecins, des danses lentes et pâmées qui échauffaient nos yeux et figuraient la convoitise, le soupir et la défaillance.

» Nous aimions les bosquets, les feuillages, la rosée. Nous étions également adroites aux chansons sensibles et aux vifs propos ; notre incrédulité irrévérencieuse et légère était dans notre bouche comme un fruit vert dont nous goûtions l’amère, aigre et piquante saveur.

» Nous aimions l’amour, c’était la seule affaire de notre vie, nous n’avons pas fait autre chose que l’amour.

» Nous n’étions point frivoles. Nous étions philosophes, encyclopédistes, géomètres, chimistes et astronomes selon nos amants. Nous avons aidé aux œuvres de Voltaire et de Rousseau. Ils nous ont fait des madrigaux et nous leur avons fait des chapitres pour leurs ouvrages.

» Nous aimions l’amour, et quelques-unes d’entre nous l’ont pratiqué avec une sombre sauvagerie.