Page:Noailles - La domination, 1905.pdf/10

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
3
LA DOMINATION

assez de m’aimer sans que je les aime à mon tour… Les femmes, plus douces et plus fières, m’irritent, mais je joue avec leur secret et leur faiblesse, je sais les limites de la plus sage : le contour de leur âme est comme leur regard, tout cerné de langueur et de désir. »

Et le jeune homme se rappela le visage de sa maîtresse.

Depuis six mois il ne l’aimait plus. Un jour, il avait senti la fin de cet amour comme on sent l’abîme. Il avait lutté, non par tendresse pour l’autre, mais pour se sauver soi-même, pour ne point périr, pour arracher aux ténèbres et continuer, s’il se pouvait, tant de sensations d’adolescence, de rêverie, de confiance et de plaisir. Ce fut en vain. Cette maîtresse maternelle et ardente, dont le dévouement ne pouvait pas changer, brusquement, un matin, sans raison, lui apparut démêlée de lui, seule, soi-même, ayant à