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LA DOMINATION

vers lui ses yeux encore clos et ses bras. Et lui, ému devant ce corps qui semble mort, pris de pitié, de douceur, se précipiterait… « Qu’as-tu ? lui dirait-il ; me reconnais-tu ? C’est moi… »

Hélas ! à ces pensées, Donna Marie se rapproche d’Émilie qui, lentement, les yeux fermés, encore glacée, reprend son souffle régulier ; et, tandis qu’elle la soigne et desserre le corset sous le flottant peignoir, elle s’intéresse de connaître — quelle trahison ! — les faibles beautés de la patiente, la taille lasse et la peau fraîche, qu’elle s’enivre de sentir inférieures à sa propre beauté…

Quand Émilie se raccroche à elle d’un geste devenu naturel, familier, Marie voudrait reculer ; mais, amèrement, elle pense : « Je la goûte comme l’autre l’a goûtée. » Et, avec un mortel plaisir, elle sent contre sa joue les larmes d’Émilie, les larmes