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LA DOMINATION

volupté, parce que ma soif et ma faim, le sorbet rouge, le biscuit, le fruit que je portais à mes lèvres, tu les eusses voulu jusque dans mon cœur manger… Tu te rappelles, ah ! n’est-ce pas ? ce bal au palais Contarini, lorsque, comme le roi passait et que je souriais, tu me froissas le poignet, pour que je me souvinsse de toi. Tu aimais, mon chéri, que je fusse un objet de douleurs, et tu aimais aussi tes propres larmes. Ah ! que de douleurs sur moi ; maintenant que de douleurs, que de meurtrissures, que d’injures ! Tant de mensonges, tant de perfidies, tant de lâchetés, tant de choses portées, tant de choses supportées !… Tout cela sur moi, qui fus ta reine craintive, la perle et la colombe dont tu étais jaloux…

Et renversée par un trop fort sanglot :

— Ô mon amour, s’écria-t-elle, bois cette offense…