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LA DOMINATION

son destin et la mort, également dégoûté, l’homme, avec stupeur, contemple son âme inerte et noire…

Mais chaque jour, chez l’étrange fille, la folie de vivre augmentait.

Antoine la vit qui s’émouvait d’une armée qui passe et chante et où tous les hommes ont vingt ans. Il la vit pleurer, pour des danses lascives et sauvages, dans un cabaret oriental où la salle grossière tremble et se pâme de désir. Il la vit jalouse d’une jeune femme étrangère qu’un amant furieux avait tuée dans la forêt.

Lorsqu’un soir il lui fit la confidence de sa naissance voilée :

— Ainsi, s’écria-t-elle, haletante, c’est cela, c’est donc cela !

Et, les mains contre les tempes, elle s’émerveillait d’être une fleur de Grenade née sur la tige royale.

— C’est donc cela, répétait-elle, victorieuse,