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LA DOMINATION

de chose, ce rien, ce vraiment rien que sont les morts. Petit cimetière en désordre, où le ménage n’est point fait, où les morts ont à souffrir d’oublis et de négligences, parce que, d’abord, il faut servir les vivants !

La tristesse, la douleur suintaient de la terre bondée, du feuillage lyrique et penché, du mur moussu et fendu, des couronnes qui survivent aux regrets, des vases, des pots renversés. Et Antoine Arnault, à force de folie, se mettait à jouer, à rire. « Puisque ce n’est rien, pensait-il, puisque c’est le néant et rien, puisque c’est au fond ridicule et révoltant, puéril et médiocre, quelle gravité me tient ici courbé, plus empli de rêves que devant un cercle de dieux ?… »

Et voici qu’il eut l’idée d’Élisabeth. Et il frissonna comme un esprit qui ne savait pas comme Adam à qui on montre la mort.

Violemment il arracha cette image de sa