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LA DOMINATION

regardait avec sévérité la poussière de la route, se sentait froissée par l’odeur des étables ou des sèches betteraves, enfin souffrait aimablement…

… Un chant de clairons éclata soudain, musique invisible, partie, semblait-il, du flanc d’une colline pierreuse, et bientôt, sous le jaune soleil, apparut, aride et brûlée, la petite ville de Sedan.

Antoine eut le cœur pressé :

« La voilà, pensait-il, la ville offensée, celle dont le nom n’est point joyeux, et déjà, dans mon enfance légère, me frappait par sa sonorité mate et brisée. C’est vous, Sedan ! Ah ! que j’étais allègre et libre, et voici que, dans vos rues, je porte sur mes épaules, comme un poids étouffant, la victoire étrangère. »

Antoine Arnault regardait les rues chaudes, paisibles, les maisons en pierre jaune, les unes humbles et vieillies, et d’autres, dans