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LA DOMINATION

nets et obliques, où entre, des deux côtés, la lumière.

Un ancien soldat, qui vieillit là, raconte toute l’histoire, qu’Antoine connaît bien, mais il l’écoute. Gagné par la colère, le défi, et pourtant étreint d’universelle pitié, il pense à la guerre misérable, à cet ouragan où la pierre, le fer, les murs et les maisons ne sont point solides, où c’est l’homme qui fait le plus sérieux rempart, l’homme tendre, découvert, dont le cœur est placé faiblement entre les os de la poitrine, mais qui, cassé, saignant, mourant, peut encore haïr, peut encore ôter la vie.

Ôter la vie !

Antoine Arnault se sent étourdi d’un vertige qui attaque sa raison.

Ôter la vie ! quand l’univers se penche en pleurant sur la douleur ; quand le malfaiteur, blessé à son tour, n’est plus un malfaiteur, mais celui à qui l’on dit : « Voici du