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STANCES À VICTOH HUGO


Je viens comme une enfant qui voudrait caresser
Ta face auguste et sainte,
Et qui, ne pouvant rien pour ta gloire, a tressé
Le lierre et la jacinthe

Comme une enfant qui tremble et qui tombe à genou
Joignant des mains glacées,
Et qui baise en pleurant les pieds joyeux et doux
De tes grandes pensées

Je crois que c’est toi Pan, que c’est toi Jéhova,
Toi le chantant Homère,
Que l’immense océan, brisant ses bords, s’en va
Dans ta poitrine amère.

Quand je vois l’infini, je pense « C’est Hugo,
C’est sa bouche profonde ! »
Et je crois que c’est vous les deux pôles égaux
Qui contiennent le monde !

Je vous lis en pleurant, en chantant tour à tour,
Vous seul m’avez fait croire
Qu’on peut mettre au-dessus de l’ineffable amour
L’héroïsme et la gloire.

Ah ! près d’Eviradnus, près du divin Roland
Qui gardent votre tombe,
Laissez que, déchirant son gosier tiède et blanc,
J’immole ma colombe…