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UN OISEAU LE SOIR


Oiseau désespéré, ne chantez pas ainsi,
Quelle est la volupté qui vous est refusée
Pour que, plein d’un aigu, d’un obstiné souci,
Vous jetiez sous les bois cette ardente fusée ?
 
Dans le plus beau bosquet vous semblez abrité,
Ne chantez pas ainsi sur deux notes dolentes,
Le printemps est déjà si dur à supporter,
Il faut du moins la paix des bêtes et des plantes…

Cessez ce cri plaintif, ce cri trop long, trop fort,
Ne pouvez-vous donc pas contenter votre rêve ?
Faut-il que vous soyez un faible et triste corps
Dont le gosier toujours se gonfle et toujours crève ?

Oiseau, n’êtes-vous pas heureux chez les oiseaux,
La paix n’habite pas votre mouvant génie ?
Vous appelez l’amour comme on appelle l’eau
Dans le désert, dans la chaleur, dans l’agonie…