Page:Noailles - Les Éblouissements, 1907.djvu/33

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

MIDI PAISIBLE


C’est un jeune parfum d’écorce, d’eau, d’arbouse,
De sève, de pollen, dans l’espace blotti.
L’arbre, plein de soleil, en verse à la pelouse,
Et le bonheur divin est partout réparti.

Le feuillage est frisé, froncé comme des ruches,
Les herbes, les semis, le bourgeon éclaté
Ont le vert argentin et luisant des perruches,
C’est plus que le printemps et ce n’est pas l’été.

Tout donne son limpide éclat, ses douces poses !
Les fleurs de l’amandier, du pêcher transparent,
Tremblent comme un essaim pressé d’abeilles roses
Dont la bouche est pâmée et le cœur odorant.

Midi glisse et languit, la vie est assoupie,
Seul l’immense soleil meut ses élytres d’or,
Mais le saule, l’étang, la cigale, la pie
Se disent l’un à l’autre, en soupirant : « Je dors. »