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Page:Noailles - Les climats, 1924.djvu/57

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Quand le rêve, entraîné au bercement de l’onde,
Semble glisser, couler vers le plaisir du monde,
Quand le soir étendu sur ces miroirs gisants
Est une joue ardente où s’exalte le sang,
J’ai cherché en quel lieu le désir se repose…
Douce îles, pâmant sur des miroirs d’eau rose,
Vous déchirez le cœur que l’extase engourdit.
Pourquoi suis-je enfermée en un tel paradis !



Ah ! que lassée enfin de toute jouissance,
Dans ces jardins meurtris, dans ces tombeaux d’essence,
Je m’endorme, momie aux membres épuisés !
Que cet embaumement soit un dernier baiser,
Tandis que, sous les noirs bambous qui vous abritent
Sous les cèdres, pesants comme un ciel sombre et bas,
Blancs oiseaux de sérail que le parfum abat,
Vous gémirez d’amour, colombes d’Aphrodite !



Des parfums assoupis aux rebords des terrasses,
L’azur en feu, des fleurs que la chaleur harasse,
Sur quel rocher d’amour tant d’ardeur me lia !…
Colombes sommeillant dans les camélias,
Dans les verts camphriers et les saules de Chine,
Laissez dormir mes mains sur vos douces échines.