Page:Noailles - Passions et vanités, 1926.djvu/69

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que de voir ces douces femmes empressées autour de notre ami, l’écoutant, le craignant, renonçant avec peine à leurs modestes cantiques romanesques accompagnés par le souffle court de leur petit orgue, mais fières d’être instruites et gourmandées par un monsieur des villes, et se résignant à entonner cette musique unie, qui privait leur cœur innocent de sa secrète sensualité. La plus vieille de ces femmes était si transparente que je ne puis la comparer qu’aux pétales macérés que j’ai vus dans de l’eau de fleurs de lis ; la plus jeune, au contraire, avait la teinte excessive de la rouge calcéolaire ; sa timidité lui faisait à jamais un masque écarlate ; dans le paradis même elle eût choisi d’être la servante de Marthe, qui fut la servante de Marie. Je me risquais un jour à demander à la moins affinée, à la plus sociable d’entre elles, comment elle supportait les monotones travaux de sa vie.

— Eh bien ! — me répondit-elle avec un grand rire modeste, — on pense au ciel !

Donc, ces humbles femmes, groupées