Page:Noailles - Poème de l’amour, 1924.djvu/107

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— Ah ! pouvoir n’aimer pas celui qu’on aime ! N’être
              Pas l’esclave d’un beau vivant !
Vivre libre, espérer, choisir, vouloir, connaître !
              Fendre l’azur comme le vent !

Ne pas être liée avec de durs cordages,
              Secs et fermés comme des poings,
Au charme inévitable et fortuit d’un visage,
              Qu’on eût pu ne rencontrer point !

N’avoir pas transféré sa digne solitude,
              Unique et nombreuse à la fois,
Dans un corps dont les yeux, la voix, la lassitude
              Semblent sacrés ou bien narquois !

Ne pas être obligée à constater sans cesse
              Que rien ne nous est plus soumis,
Et que, ne nous laissant qu’une atroce paresse,
              Notre cœur bat dans l’ennemi !…