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LES QUATRE TALISMANS[1].


première journée.

Travaillez, prenez de la peine ;
C’est le fonds qui manque le moins.


Il y avoit une fois, à Damas, un vieillard très-riche, très-riche, qu’on appeloit le Bienfaisant, parce qu’il n’usoit de ses trésors que pour adoucir les maux du peuple, soulager les malades et les prisonniers, ou héberger les voyageurs ; et il réunissoit tous les jours quelques-uns de ceux-ci à sa table, car il n’étoit pas fier,

  1. Les Quatre Talismans ont été publiés, dans l’année 1838, avec la Légende de sœur Béatrix, en 1 vol. in-8o de 304 pages et une préface. Voici ce que dit Nodier, dans cette préface, sur la pensée qui lui a inspiré ce conte :

    « J’ai consacré les Quatre Talismans à la classe de la société qui a le mieux compris, selon moi, ses obligations de la vie, et qui en tireroit le parti le plus raisonnable, si elle connoissoit tous ses avantages, c’est-à-dire aux ouvriers. J’ai voulu leur montrer dans un cadre trop étroit pour un tableau de cette importance, mais dont tout le monde peut agrandir la bordure à sa fantaisie, que les conditions de supériorité sociale les plus universellement reconnues ajoutent fort peu de chose ou n’ajoutent rien au bonheur, et qu’il arrive même assez souvent qu’elles le rendent impossible, tandis qu’il y a peu d’exemples d’un travail actif, obstiné, consciencieux, dirigé par l’envie de bien faire, qui n’ait pas tôt ou tard trouvé en lui-même sa récompense légitime. Cette leçon est grande,