juste sur le nom de la dernière de nos reines, cette particularité positive rentrant dans la catégorie des faits vrais dont il avoit perdu la connoissance.
Mon père réunissoit deux ou trois de ses amis à dîner, le premier jour de chaque quinzaine. Un de ses convives, qui étoit étranger à la ville, se fit attendre assez longtemps.
— Excusez-moi, dit-il en prenant place ; le bruit s’étoit répandu, d’après quelques lettres particulières, que l’infortunée Marie-Antoinette alloit être envoyée en jugement, et je me suis mis un peu en retard pour voir arriver le courrier du 13 octobre. Les gazettes n’en disent rien.
— Marie-Antoinette, reine de France, dis-je avec assurance, est morte ce matin sur l’échafaud peu de minutes avant midi, comme je revenois du collège.
— Ah ! mon Dieu ! s’écria mon père, qui a pu te dire cela ?
Je me troublai, je rougis, j’avois trop parlé pour me taire.
Je répondis en tremblant : C’est Jean-François les Bas-Bleus.
Je ne m’avisai pas de relever mes regards vers mon père. Son extrême indulgence pour moi ne me rassuroit pas sur le mécontentement que devoit lui inspirer mon étourderie.
— Jean-François les Bas-Bleus ? dit-il en riant. Nous pouvons heureusement nous tranquilliser sur les nouvelles qui nous viennent de ce côté. Cette cruelle et inutile lâcheté ne sera pas commise.
— Quel est donc, reprit l’ami de mon père, ce Jean-François les Bas-Bleus qui annonce les événements à cent lieues de distance, au moment où il suppose qu’ils doivent s’accomplir ? un somnambule, un convulsionnaire, un élève de Mesmer ou de Cagliostro ?
— Quelque chose de pareil, répliqua mon père, mais