ger. C’est, selon, moi, de cette disposition physiologique, placée dans les conditions qui la développent, qu’est sorti le merveilleux de tous les pays.
On s’imagine mal à propos que le cauchemar ne s’exerce que sur des fantaisies lugubres et repoussantes. Dans une imagination riche et animée, que nourrissent la libre circulation d’un sang pur et la vitalité robuste d’une belle organisation, il a des visions qui accablent la pensée de l’homme endormi par leurs enchantements, comme les autres par leurs épouvantes. Il sème des soleils dans le ciel ; il bâtit pour approcher des villes plus hautes que la Jérusalem céleste ; il dresse pour y atteindre des avenues resplendissantes aux degrés de feu, et il peuple leurs bords d’anges à la harpe divine, dont les inexprimables harmonies ne peuvent se comparer à rien de ce qui a été entendu sur la terre. Il prête au vieillard le vol de l’oiseau pour traverser les mers et les montagnes ; et auprès de ces montagnes, les Alpes du monde connu disparaissent comme des grains de sable ; et dans ces mers, nos océans se noient comme des gouttes d’eau. — Voilà tout le mythisme d’une religion, révélé depuis l’échelle de Jacob jusqu’au char d’Élie, et jusqu’aux miracles futurs de l’Apocalypse.
Pour opposer à ceci une théorie plus vraisemblable il faudroit d’abord établir que la perception, éteinte par le réveil, ne peut ni se prolonger, ni se propager dans la pâle et froide atmosphère du monde réel. C’est la véritable place de la question.
Eh bien ! cela seroit démontré dans l’état de rationalisme étroit et positif auquel le long désenchantement de la vie sociale nous a réduits, que cet argument ne vaudrait rien contre l’impression toute naïve des premières sociétés, qui ont toujours regardé le sommeil comme une modification privilégiée de la vie intelligente ; et d’où procède le merveilleux, je vous prie, si ce n’est de la créance des premières sociétés ?