Page:Nodier - Dissertations philologiques et bibliographiques.djvu/223

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tripots, et en quelles mains était déjà tombé le jeu du roi et de la reine. Quant à la chronique du Petit-Jehan de Saintré, où l’on remarque cette phrase : Vous qui estes noiseux et joueux de cartes et des dés, cette chronique, dont le héros est page à la cour de Charles V en 1367, ne doit pas être invoquée en témoignage, puisque l’auteur, Antoine de la Sale, né en 1398, n’écrivait que sous Charles VII. — On a longuement et vainement disserté pour savoir si les cartes étaient françaises, allemandes, espagnoles ou italiennes : il me paraît toujours certain qu’elles ne sont pas françaises, du moins les cartes de tarot. Un vieux livre, Le Jeu d’or, imprimé à Augsbourg en 1472, assure, dit-on, qu’elles prirent naissance en Allemagne vers 1300 ; l’abbé Rive veut que ce soit en Espagne, par l’imagination de Nicolao Pépin, vers 1330 ; l’abbé de Longuerue, au contraire, veut que ce soit en Italie, à une époque antérieure. — Toujours est-il que les signes et couleurs des cartes diffèrent dans ces pays : les Français ont pique, trèfle, carreau et cœur ; les Espagnols, épée, bâton, denier et coupe ; les Allemands, vert, gland, grelot et rouge ; ces couleurs doivent être contemporaines du jeu de piquet, qui fut trouvé sous Charles VII, en même temps que les cartes avec lesquelles on le joue encore aujourd’hui. Jusque-là les tarots seuls étaient en usage dans toute l’Europe ; mais depuis l’invention du jeu de piquet, ils ont beaucoup perdu de leur bizarre physionomie et ne sont pas restés en France, mal-