Page:Nodier - Les Femmes celebres contemporaines.pdf/24

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

que ceux d’un culte aveugle et d’une adoration fanatique ; et même alors, nous les aurions détournées avec des larmes, dont le pouvoir était plus sûr que celui de nos discours, de descendre pour nous jusqu’à l’égalité sociale : la femme préfet, la femme procureur du roi, la femme pair de France ou ministre, sont des fictions plus bizarres que tous les caprices du sculpteur gothique, qui brode ses cauchemars fantasques autour du front des chapiteaux. Abdiquer le nom de femme pour devenir, grand Dieu ! je ne sais quoi de semblable à l’homme, c’est bien pis que l’aberration d’une vanité stupide ; c’est une profanation et un sacrilége ! Toute femme qui aspire à l’état de l’homme, n’est pas digne d’être femme.

La belle et noble émulation que nous approuvons dans les femmes, c’est celle d’une éducation plus forte et plus correcte, qui les rend capables de présider avec succès à la première éducation de leurs enfants ; c’est celle d’une instruction plus étendue et plus variée qui les initie jusqu’à un certain point aux jouissances que l’étude des sciences procure, sans les égarer toutefois dans les voies maussades du pédantisme ; c’est celle qui les porte à exercer assidûment les brillantes facultés d’une imagination plus vive et plus déliée que la nôtre, d’une sensibilité plus délicate, plus fine et plus universelle, et surtout ce tact ingénieux et doux qui leur fait saisir, dans les rapports des idées entre elles, mille nuances qui nous échappent. C’est ainsi que nous comprenons, dans la nature même de leur organisation privilégiée, tout ce qu’elle peut comporter d’émancipation légitime