Page:Nodier - Les Femmes celebres contemporaines.pdf/64

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Pour baiser sa main blanche et voir son œil qui brille ;
C’est pour détacher sa mantille
Ou bien ses bagues de rubis……
Avec son grand bras de squelette,
La potence là-bas m’attend :
Je le sais, j’en ris ; car avant
Qu’on me passe la collerette,
Par ma croix et mon chapelet !
Vos cachots seront sans grillage,
Et le vent, la pluie et l’orage
Pourriront votre vieux gibet !

Il ne restait plus à Mme Ségalas, que d’égaler Victor Hugo dans la poésie descriptive, non pas cette versification à la Delille, fausse, guindée, qui s’essouffle à déguiser la trivialité de la chose sous les oripeaux de la périphrase, mais cette poésie imagée, luxuriante, éclatante, orientale, comme Hugo l’a surnommée. M Ségalas offre au parallèle le discours d’un Sauwage à un Européen, Paris et le Marin. Que l’on compare cette dernière pièce avec la prétentieuse amplification, la Frégate la Sérieuse, que M. Alfred de Vigny a prétendu opposer aux resplendissantes et magiques Orientales de Victor Hugo :

Oh ! l’orage, mon Dien ! Le ciel rouge d’allume !
A l’arrière, à l’avant ! le tillac s’emplit d’ean !
Plus vite encor ! — La mer étreint mon beau vaisseau
Dans ses baisers tout blancs d’écume !

Allons, calez la voile ! — Oh ! voyez les éclairs !
Mousses, sur les haubans ! matelots, aux cordages ! -
Nous, marins, nous jetons notre vie aux orages,
A tous les vents du ciel, à tous les flots des mers.

L’eau roule verte et jaune, et la vague blanchie,
Ainsi qu’un mont de neige, arrive en se levant ;
L’océan gronde, et Dieu le bat avec le vent,
Comme un esclave qu’on châtie.