Page:Nodier - Les Femmes celebres contemporaines.pdf/65

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Eh bien ! je t’aime encore, ô mer, quand je te vois
Comme un lion blessé qui bondit de colère,
Se roule, se débat, redresse sa crinière
Et se met à rugir avec sa grande voix ! —

Ces magnifiques vers ne seraient-ils pas admirés dans les Orientales ? Me Ségalas n’a-t-elle pas en elle quelque chose du génie de Victor Hugo ?

Enfin, M="Ségalas est allée plus loin dans les deux Chodruc Duclos, et surtout dans les vers adressés à une Tele de mort:en lisant cette sublime et philosophique allocution, chacun pourra, comme nous, apprécier le rang que l’auteur doit prendre entre nos meilleurs poëtes.

A UNE TETE DE MORT[1]

Squelette, qu’as-tu fait de l’âme ?
Foyer, qu’as-tu fait de ta flamme ?
Cafe muette, qu’ao-tu fait
De ton bel oiseau qui chantait ?
Volcan, qu’as-tu fait de ta lave ?
Qu’as-tu fait de ton maitre, esclave ?
Comme une souveraine avec toute sa cour,
Une âme t’habitait. Son cortège d’amour,
D’espoir, chantait, pleurait, et peuplait son domaine;
Tu n’es plus qu’un désert:le lézard sous ton front
S’établit; l’âme a fui:le frèle moucheron
S’introduit librement dans son château de reine.
Étais-tu femme et belle, avec de longs cils noirs,
Des fleurs dans les cheveux, souriant aux miroirs ;
Grand seigneur, dépassant les tétes de la foule;
Jeune homme, et délirant pour des yeux bruns ou bleus ?
Oa ne sait : tous les morts se ressemblent entre eux ;
La vie a cent aspects, le néant n’a qu’un moule.

  1. Cette tête de mort » été tronvée dans les ruines da châtean royal du Vivier, appartenant aujourd’hui à M. Parquin.