des aperceptions, je me la représente ainsi : la volonté envoie aux muscles des artères cérébrales des impulsions motrices (probablement inconscientes) ; par là les vaisseaux sanguins sont élargis ou rétrécis selon le besoin, et l’afflux du sang est plus ou moins abondant [1]. Les cellules qui ne reçoivent pas de sang doivent cesser leur travail ; celles qui en reçoivent une forte quantité peuvent au contraire fonctionner plus vigoureusement. La volonté qui, sous l’impulsion d’un groupe d’aperceptions obtenant temporairement la prédominance, préside à cette distribution de sang, ressemble donc à un serviteur incessamment occupé, dans un appartement, à allumer, sur l’ordre de son maître, ici la flamme du gaz, là à la monter davantage, ailleurs à la baisser ou à l’éteindre, de telle sorte que ce coin de l’appartement est alternativement clair, demi-obscur ou sombre [2]. La prédominance d’un
- ↑ Il est possible qu’il ne s’agisse pas d’un élargissement actif des vaisseaux sanguins, mais seulement d’un rétrécissement. On a nié dans ces derniers temps (entre autres le Dr Morat, La Semaine médicale 1892, p. 112) qu’il y ait des nerfs dilatant les vaisseaux. Mais l’effet serait dans les deux cas le même. Car, par le rétrécissement des vaisseaux de quelques parties du cerveau, le sang chassé de celles-ci serait poussé dans les autres parties, et celles-ci éprouveraient un plus fort afflux sanguin, absolument comme si leurs vaisseaux étaient activement élargis.
- ↑ Lorsque j’écrivais ce passage, j’étais convaincu que la théorie physiologique de l’attention qui y est exposée avait été trouvée par moi seul. Mais depuis la publication de ce volume j’ai lu l’ouvrage d’Alfred Lehmann : L'Hypnose et les états normaux qui s'y rattachent, Leipzig, 1890, et j’y ai retrouvé (p. 27) à peu près mot à mot ma théorie. Lehmann l’a donc publiée deux années avant moi, ce que je reconnais loyalement ici. Le fait que nous nous sommes rencontrés en ce point indépendamment l’un de l’autre témoignerait que l’hypothèse des actions réflexes vasomotrices est plausible. Wundt (Hypnotisme et Suggestion, Paris, 1893, p. 42-47) critique, il est vrai, le travail de Lehmann, mais il paraît admettre cette hypothèse, qui est aussi la mienne ; du moins il n’élève pas d’objection contre elle.