Page:Nordau - Dégénérescence, tome 1.djvu/113

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
97
PSYCHOLOGIE DU MYSTICISME

tres d’excitations, qui agissent simultanément de la façon décrite plus haut. Dans la conscience surgit une série d’aperceptions primitives qui sont plus fortes, c’est-à-dire plus nettes que les représentations associées, réveillées à leur suite ; et ces aperceptions plus nettes sont précisément celles causées par l’homme qui est devant nous. Elles sont en quelque sorte les points les plus lumineux parmi d’autres moins brillants. Ces points plus lumineux prédominent nécessairement dans la conscience sur les moins lumineux. Ils remplissent la conscience, qui les réunit en un jugement. Car ce que nous nommons jugement n’est, en dernière analyse, rien autre chose que l’apparition simultanée dans la conscience d’un nombre d’aperceptions et de représentations que nous mettons en rapport les unes avec les autres, simplement parce que nous prenons conscience d’elles en même temps. La prédominance que les aperceptions plus claires gagnent dans la conscience sur les plus obscures, les aperceptions primitives sur les représentations amenées à leur suite, leur permet, avec l’aide de la volonté, d’influencer un certain temps en leur faveur toute l’activité cérébrale, c’est-à-dire de supprimer les représentations plus faibles, — celles amenées à la suite des aperceptions primitives, — de combattre celles qui ne se laissent pas lier à elles, d’en renforcer d’autres qui les renforcent elles-mêmes et qui, au milieu de l’incessante apparition et disparition des aperceptions se chassant les unes les autres, leur assurent quelque durée ; enfin, de les entraîner dans leur cercle d’excitation, ou de commencer seulement à les éveiller. L’intervention de la volonté dans cette lutte pour l’existence