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DIAGNOSTIC

et sa marque un châtiment. Ces stigmates sont les difformités, les formations multiples et les arrêts de développement : en première ligne l’asymétrie, c’est-à-dire le développement inégal des deux moitiés du visage et du crâne ; puis les imperfections de l’oreille, qui frappe par sa grandeur informe ou s’écarte de la tète en guise d’anse, dont le lobule manque ou est adhérent, le rebord (helix) non ourlé ; ensuite le strabisme, le bec-de-lièvre, les irrégularités dans la forme et la position des dents, la coupe ogivale ou plate de la voûte du palais, les doigts soudés ou surabondants (syn = et polydactylie), etc. Morel énumère dans son livre les signes anatomiques de dégénérescence, dont la liste a été notablement accrue par les observateurs venus après lui. Lombroso, notamment, a considérablement enrichi la connaissance des stigmates [1], mais il ne les attribue qu’à son « criminel-né », restriction qui, précisément au point de vue scientifique du maître italien, ne peut se justifier, car les « criminels-nés » ne sont autre chose qu’une subdivision des dégénérés. Féré exprime cela très nettement, quand il dit : « Le vice, le crime et la folie ne sont séparés que par les préjugés sociaux [2]».

Il y aurait un moyen sûr de prouver qu’elle n'est pas arbitraire, que ce n’est pas une boutade sans fondement, mais un fait, l’affirmation que les auteurs de tous les mouvements « fin de siècle » en art et en littérature sont des dégénérés ; ce serait d’examiner soigneusement leur per-

  1. L'Homme criminel (criminel-né, fou moral, épileptique), traduction française par Régnier et Bournet. Paris, 1887, p. 142 et sqq.
  2. La famille névropathique. Archives de Neurologie, 1884, n°’ 19 et 20.