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EINSTEIN ET L’UNIVERS.

toujours à ceci : dire que le bord d’un objet est droit, c’est dire que la ligne qui le délimite coïncide sur toute sa longueur avec un rayon lumineux[1]. On peut donc affirmer : pratiquement la ligne droite est le chemin parcouru par la lumière dans un milieu homogène.

Mais alors une question se pose. Le monde où nous vivons, l’univers est-il conforme à la géométrie d’Euclide, est-il euclidien, pour employer l’adjectif à la mode qui n’est peut-être pas encore au dictionnaire de l’Académie, mais qui y sera ?

Car il faut bien dire maintenant que la géométrie d’Euclide n’est pas la seule qu’on ait créée. Au xixe siècle des savants profonds et hardis, Riemann, Bolyay, Lobatchewski, Poincaré lui-même, ont fondé des géométries nouvelles très différentes, assez étranges. Elles sont tout aussi logiques et cohérentes que la géométrie classique d’Euclide, mais elles sont basées sur des axiomes, sur des postulats autres, c’est-à-dire sur des définitions différentes.

Par exemple on appelle parallèles deux lignes droites situées dans un même plan et qui ne se rencontrent jamais. La géométrie chère à notre enfance dit : par un point on ne peut faire passer qu’une seule parallèle à une droite donnée. C’est ce qu’on appelle le postulat d’Euclide. Survient Riemann qui n’admet pas ce postulat et le remplace par celui-ci : par un point on

  1. Il va sans dire que dans tout ceci le rayon lumineux est censé se propager dans un milieu homogène.