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EINSTEIN ET L’UNIVERS.

très bien que le rayon lumineux venu du piquet arrière court derrière le wagon et par conséquent a, par rapport à lui, une vitesse inférieure à 300 000 kilomètres par seconde ; je sais que de là provient l’erreur du voyageur, mais je n’ai aucun moyen de le convaincre de cette erreur, car il me répondra toujours et avec raison : « J’ai mesuré la vitesse avec laquelle ce rayon m’arrive et je l’ai trouvée égale à 300 000 kilomètres. » Chacun de nous en réalité a raison.

En mouvement très rapide, un carré paraîtrait un rectangle à l’observateur ; un cercle paraîtrait elliptique. Si la Terre tournait quelques milliers de fois plus vite autour du Soleil, nous le verrions allongé et pareil à un gigantesque citron suspendu dans le ciel. Si un aviateur pouvait survoler à une vitesse fantastique la place Vendôme, suivant la direction de la rue de la Paix, — et si ses impressions rétiniennes étaient instantanées, — la place aurait pour lui la forme d’un rectangle très aplati ; s’il la survolait suivant une diagonale, il la verrait, de carrée qu’elle était, devenir un losange. Si le même aviateur survolait, en la coupant, une route où chemine du bétail bien engraissé conduit vers l’abattoir, il s’étonnerait, car les animaux lui sembleraient étonnamment minces et maigres sans que leur longueur ait varié.

Le fait que les déformations dues à la vitesse sont réciproques est une des conséquences les plus curieuses de tout cela. Un homme qui serait capable de circuler en tous sens parmi les autres hommes avec la vitesse