Aller au contenu

Page:Normand - Soleils d’Hiver, 1897.djvu/173

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


Nice, 25 décembre.


Te conterai-je tout, — oui, tout, — mon cher journal ?
C’est aujourd’hui Noël. Réveil très matinal,
Du moins pour moi… Mon maître et seigneur dort encore.
Je me suis éveillée et levée à l’aurore
Et je m’installe ici, devant toi, mon petit,
Pour te dire… Mon doigt reste en l’air, interdit,
Tenant la plume prête et n’osant rien écrire…
Eh ! mon Dieu, pourquoi donc ?… Est-il si mal de rire
Et de s’aimer ?… Enfin, cesse d’être étonné,
Nous avons hier soir tous deux… réveillonné
Dans un coquet salon agrémenté de roses.
Un menu… Quel menu ! Monsieur fait bien les choses,
Et je soupçonne fort que ce menu de roi
Fut commandé jadis… pour d’autres que pour moi.
Mais ne ranimons pas ces souvenirs infâmes…
Le passé des maris n’appartient point aux femmes !

Moi, dont le souvenir est moins… capitonné,
Je jugeais tout charmant, exquis, bien ordonné,
Je sautais de plaisir ainsi qu’une gamine…
Mon estomac tenté cria bientôt famine…
Tu sais, mon cher journal, mon bon vieux compagnon,
Qu’un peu de gourmandise est mon péché mignon.
Je me mis à parler, à rire… une folie !
Il me répétait, lui, qu’il me trouvait jolie,