Page:Notice historique sur les ouvrages et la vie de Cuvier.djvu/105

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famille qui savait apprécier un tel chef, et le chérissait comme il méritait de l’être. On peut aisément comprendre l’accablement dans lequel sa mort a plongé l’épouse inconsolable, frappée déjà de tant de coups ; la fille dévouée, qui mettait tout son bonheur à surveiller avec sa mère une aussi précieuse vie ; le digne frère, dont l’ame élevée comprend si bien l’étendue d’une telle perte ; le modeste collaborateur de M. Cuvier, l’excellent M. Laurillard, dont l’existence, attachée pendant trente ans à celle de son maître et de son ami, semble n’avoir plus de lien sur cette terre ; enfin le neveu du grand homme, seul héritier d’un nom dont la double illustration devient pour lui, dès ce moment, un grand devoir, auquel il consacrera sa vie.

Je ne vous peindrai pas la profonde douleur où cette mort a plongé des amis dévoués, qui en seront émus jusqu’au dernier soupir. Elle servirait cependant à vous faire connaître, jusqu’à quel point M. Cuvier se faisait chérir de ceux qui avaient le bonheur de vivre dans son intimité. Mais, quand une perte comme la sienne excite des regrets universels, quand elle est ressentie dans le monde civilisé tout entier, ne me reprocheriez-vous pas de détourner vos regards de ce grand tableau, pour les arrêter sur le spectacle de ces deuils particuliers, trop restreints pour celui qui appartenait à l’humanité toute entière. C’est d’ailleurs la vie du savant que j’ai cherché à vous faire apprécier dans tout le cours de mon récit ; c’est elle surtout qui doit être ici l’objet de nos regrets.

Combien cette vie si active, si productive et si parfaitement remplie, pouvait encore être utile, si elle se fût prolongée de dix ans !