Page:Noufflard - Lohengrin à Florence, 1888.djvu/14

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du duo d’amour, qui nous avait semblé long, Mlle Meyer a fait une scène de haute tragédie, qui nous a semblé courte, tant les émotions qui s’y succèdent dépassent par leur variété et leur vivacité, la longueur du temps qu’elles remplissent. D’abord, comme on sent bien qu’Elsa brûle pour son époux de l’amour passionné qui, de la jeune fille va faire une femme. Et c’est cet amour même qui la perd. Car c’est bien l’amour qui lui inspire le désir de pouvoir au moins prononcer le nom de celui qu’elle adore. « Mon nom semble si doux dans ta bouche, le son du tien, ne l’entendrais-je pas ?... Permets que dans tes bras, je puisse au moins le murmurer tout bas »[1] Mlle Meyer prononçait ces mots avec une grâce insinuante, qui, dans la vierge faisait apparaître la sirène, et mettait à nu cette vérité, charmante après tout, qu’à la tendresse désintéressée de l’ange, la femme unit toujours la coquetterie et la câlinerie de la chatte. Hélas ! pour la calmer, Lohengrin emploie le pire des moyens ; il lui dit qu’il ne vient pas des douleurs et de la nuit mais des splendeurs de la béatitude. Dès lors tout est perdu, car ce qui tourmente Elsa, ce n’est pas le doute, c’est la crainte de le perdre. Dès lors c’en est fait de la volupté, c’en est fait même de l’amour ; il n’y a plus dans le cœur d’Elsa qu’une angoisse terrible. Déjà elle croit voir le cygne qui vient chercher son époux ! Alors aux molles inflexions et aux attitudes voluptueusement serpentantes, succèdent les ges-

  1. Il mio nome sul tuo labrro è grato.... Dell ! fa ch’ io pure il tuo ripeta ancor !.. In sol proferirô quel nome amato Quando siam soli in braccio dell’amoi !...