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SAVOIR AIMER

Qu’ils font couler une encre impure sous leur plume.
Cet homme si loyal, ce héros si charmant,
S’il vous adore, il tue et sur un signe il ment.

L’heure sonne, écoutez, c’est l’heure de la femme
Car les temps sont venus, où, tout vêtu de noir,
L’homme, funèbre, a l’air d’être en deuil de son âme,
Ah ! rendez-lui son âme, et comme en un miroir
Qu’il regarde en la vôtre et qu’il aime à s’y voir.

Au lieu de le tenter, comme un démon vous tente
Au lieu de garrotter ses membres las, au lieu
De tondre sur son front sa toison éclatante
Vous, qui foulez son cœur, et vous faites un jeu
De piétiner sa mère, et d’en dissiper Dieu,

Versez-lui le vin rouge où son orgueil se grise ;
Retirez-lui l’épée où se crispe sa main,
Montrez-lui les sentiers qui mènent à l’église,
Parmi l’œillet, le lys, la rose et le jasmin.
Faites-lui voir le vice un banal grand chemin.

Dites à ces enfants qu’il n’est pas raisonnable
De poursuivre le ciel ailleurs que dans les cieux.
De rêver d’un amour qui cesse d’être aimable,
De se rire du maître en s’appelant des dieux,
Et de nier l’enfer quand ils l’ont dans les yeux.

Cependant l’homme est roi ; s’il courbe son échine
Sur le sillon amer qu’il creuse avec ennui,
S’il traîne ses pieds lourds, le sceau de l’origine
Céleste à son front reste où l’amour même à lui.
Et comme il sort de Dieu, femme, tu sors de lui.