Page:Nouveau - Valentines et autres vers, 1921.djvu/11

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
13
VALENTINES

subitement la résolution de suivre l’homme légendaire qui avait, disait-on, « perdu Verlaine », c’était un peu, et même beaucoup, parce qu’on venait de le lui signaler comme un être néfaste. L’auteur des Valentines n’était pas contrariant, il avait plutôt un esprit d’opposition tranquille, souriante, et, parfois, gracieusement ironique. Cela venait du besoin constant de construire ses idées en faisant « le manoir à l’envers », aussi d’une tendance perpétuelle à chercher un autre aspect des choses : d’abord par crainte, assez légitime, de l’erreur, puis par le désir, peut-être dominant, que de nouvelles conceptions fussent plus amusantes que les premières. Il pouvait arriver qu’un peu de douce amertume contribuât à ce travail de subversion intellectuelle. Par exemple, s’il venait à remarquer dans la rue que les chevaux trottaient, que les piétons semblaient affairés, il s’en étonnait avec dédain : « Pourquoi tous ces gens qui se hâtent ?… Ne va-t-on pas toujours assez vite ?… C’est donc bien beau, ce qui est au bout ? C’est donc bien utile, ce que l’on va faire ?… » Et joyeux de sa trouvaille, il ralentissait le pas à l’instant même, s’abstenant pourtant de s’arrêter aux étalages, pour peu que la pensée lui vînt que l’on connaît tout, qu’il n’y a plus rien à voir… sinon des singularités — échappant aux yeux du vulgaire — chez les jeunes femme, qu’il rencontrait. Supposons que ses amis, au lieu de « chiner » Rimbaud, l’eussent porté aux nues, il aurait pensé : « Puisque cet homme a tant d’admi-