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HYMNES À LA NUIT.
TRADUITES DE NOVALIS.[1]


1.

Quel mortel, quel être doué de la faculté de sentir, ne préfère pas au jour fatigant la douce lumière de la nuit avec ses couleurs, ses rayons, ses vagues flottantes qui se répandent partout. Oh ! comme alors l’ame, avec ce qu’elle a de plus intime, respire cette lumière du monde gigantesque des astres ! La pierre aussi la respire, la pierre qui étincelle, et puis la plante qui ouvre ses pores, et puis l’animal sauvage ; mais avant tout l’étranger avec ses regards ardens, sa démarche incertaine et ses lèvres tremblantes ! Car c’est elle qui, semblable à un roi de la nature terrestre, opère d’innombrables métamorphoses, noue et dénoue mainte alliance, et entoure de son image céleste les choses d’ici-bas, et c’est

  1. Je ne puis pas donner les pages suivantes comme une traduction littérale de Novalis, je crois qu’il est presque impossible de traduire littéralement en notre langue cet auteur. La poésie allemande admet déjà par elle-même dans ses tournures et ses expressions une sorte de vague que nous ne supporterions pas en français, et ce vague devient bien autre chose quand il s’y joint un mysticisme comme celui de Novalis. Il m’a fallu, pour me conformer au génie de notre langue essentiellement claire, précise, et assez prude et revêche, soit dit en passant, retrancher en certains endroits, ajouter en d’autres, employer quelquefois toute une ligne, pour rendre la signification d’un mot, et prendre aussi sur moi d’interpréter de temps à autre la pensée de l’auteur. Avec cela je ne puis pas aspirer à l’honneur de donner une traduction irréprochable des Hymnes à la nuit, de Novalis ; aussi je ne l’adresse que comme essai, et cependant comme un essai consciencieux, à ceux qui en ont absolument besoin pour se donner une idée des morceaux que j’ai traduits. Quant aux autres, quant à ceux qui peuvent lire l’allemand, je leur conseille de tout mon cœur de laisser là cette traduction, et d’avoir recours à l’original. X. M.