Page:Nouvelles soirées canadiennes, juil & août 1883.djvu/25

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
311
souvenirs de rome

refusèrent de le dévorer, comme la chose arriva à plusieurs autres martyrs ; car il écrit à Timothée : j’ai été arraché à la gueule du lion.

Ce qui est certain, c’est qu’il passa neuf mois avec Pierre dans les sombres cachots de la Prison Mamertine, et qu’ils en furent tirés pour aller à la mort. À cette heure de ténèbres, Néron venait d’être fait dieu par ses pontifes, et la terre silencieuse s’inclinait devant lui.

« Lequel, s’écrie saint Jean Chrysostome dans le transport de son admiration, lequel des deux est l’illustre, le glorieux vainqueur ? Ce prisonnier qu’on traîne, chargé de fers, hors d’un cachot, ou ce prince qui sort couvert de pourpre des splendeurs d’un palais ? Eh bien ! c’est incontestablement le captif. Comment cela ? c’est que l’un, en dépit de ses armées et de sa domination splendide, n’arrivait pas à imposer à l’autre sa volonté. Ce misérable, chargé de chaînes, ce malfaiteur, ce pauvre en haillons, lui opposait une résistance invincible. Néron disait : cesse de répandre la parole évangélique. Paul disait : non ! la parole de Dieu ne s’enchaîne pas ! Et ce barbare, ce captif, ce faiseur de tentes, ce pauvre mourant de faim, se jouait du despote au comble de l’opulence, au faite de la domination, et qui voyait le monde entier tributaire de sa munificence. Qui donc étincelait de gloire et se couronnait de splendeurs ? Le vainqueur dans les chaînes, ou le vaincu sous la pourpre ? »