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INTRODUCTION

songes qui n’ont même pas de nom et ses lèvres qui ne peuvent rien dire ; et peut-être que l’autre, s’il est digne de comprendre, n’oserait interroger…

Mais s’il lui fallait d’autres preuves, elle le mènerait parmi ceux dont les œuvres touchent presque au silence. Elle ouvrirait la porte des domaines où quelques-uns l’aimèrent pour elle-même, sans s’inquiéter des petits gestes de son corps. Ils monteraient tous deux sur les hauts plateaux solitaires où la conscience s’élève d’un degré et où tous ceux qui ont l’inquiétude d’eux-mêmes rôdent attentivement autour de l’anneau monstrueux qui relie le monde apparent à nos mondes supérieurs. Elle irait avec lui aux limites de l’homme ; car c’est à l’endroit où l’homme semble sur le point de finir que probablement il commence ; et ses parties essentielles et inépuisables ne se trouvent que dans l’invisible, où il faut qu’il se guette sans cesse. C’est sur ces hauteurs seules qu’il y a des pensées que l’âme peut avouer et des idées qui lui ressemblent et qui sont aussi impérieuses qu’elle-même. C’est là que l’humanité a régné un instant, et ces pics faiblement éclairés sont peut-être les seules lueurs qui signalent la terre dans les espaces spirituels. Leurs reflets ont vraiment la couleur de notre âme. Nous sentons que