Page:Novalis - Les Disciples à Saïs, 1914, trad. Maeterlinck.djvu/296

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
240
FRAGMENTS

De toute façon, la vie ne peut s’expliquer que par la vie, l’émotion que par l’émotion. Si toute matière est à la force comme l’objet au sujet, toute matière et toute force sont d’une même origine, et unies dans le fond comme elles sont séparées dans la suite. La vie est-elle simplement émotion compliquée ou une combinaison plus haute ? L’émotion est-elle composée d’excitation et de sensation ?

Lorsqu’on veut faire et atteindre quelque chose de déterminé, il faut que l’on s’impose des bornes provisoires. Celui qui ne veut pas le faire, est semblable à celui qui ne veut pas nager avant de savoir nager. Il y a un idéaliste magique comme il y a un réaliste magique. L’un cherche un mouvement miraculeux, un sujet miraculeux, l’autre, un objet miraculeux, une forme miraculeuse. Tous deux sont affectés d’une maladie logique, d’une espèce de délire, dans lequel, sans doute, l’idéal se manifeste ou se reflète d’une double manière ; ce sont de saints êtres isolés, qui réfractent merveilleusement la lumière supérieure — des prophètes fous. — Le rêve est de même prophétique, caricature d’un étrange avenir.

L’enivrement des sens est à l’amour ce que le sommeil est à la vie.