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tions. La Gaule, avant l’arrivée des Romains, était partagée entre 80 cités indépendantes qui se faisaient souvent la guerre. Si le nombre des morts, dans ces combats, avait dépassé les naissances, la Gaule aurait été réduite en désert ; la race celtique aurait disparu.

Tout ce qui vient d’être dit démontre, je l’espère, que le point de vue darwinien, d’après lequel le massacre universel et perpétuel aurait été la condition de l’humanité primitive, est un pur roman qui ne soutient pas la critique une seule minute.

Je dois rappeler ici un phénomène dont j’ai parlé plus haut[1] : celui de l’instinct de non-attaque entre semblables. Pourquoi les tigres ne se mangent-ils pas entre eux ? Entre autres raisons, parce que, si les tigres avaient voulu toujours se manger entre eux, leur espèce aurait péri. L’instinct de ne pas se combattre entre semblables a été fixé par hérédité. Nos ancêtres du pleistocène devaient posséder cet instinct. Plus ils ressemblaient aux animaux, et plus ils devaient en avoir aussi les caractères psychologiques. On ne voit pas pour quelle raison l’homme, encore plongé dans l’animalité, aurait été privé de cet instinct par une exception unique. La nature est aveugle. Elle ne connaît pas de privilégiés assurément, mais pas non plus de persécutés. J’ai montré plus haut que, lorsque son intelligence a grandi, les instincts ont passé au second plan, et l’homme a attaqué son semblable. Mais il est contraire à la logique d’affirmer que l’homme, n’ayant pas encore acquis une haute intelligence, agissait, cependant, comme s’il l’avait acquise, c’est-à-dire en dehors de l’instinct.

Je dois ajouter, de plus, que l’instinct du respect du semblable a dû se produire chez l’homme primitif d’autant plus fortement qu’il n’était pas carnivore, mais fructivore. Les carnivores, même sans se manger entre eux,

  1. Voir p. 52.