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ROMANS D’ANALYSE

mes causes : ils sont l’un et l’autre victimes de l’éducation toute négative qu’ils ont reçue et aussi du milieu dans lequel ils ont vécu, le premier imprégné de jansénisme, le second de puritanisme protestant. Tous deux tuent la femme qu’ils rendent responsable de leur chute dans un geste de désespoir que seule peut expliquer la conception qu’ils se font de Dieu : ils n’ont vu que le Dieu-Justicier et Impitoyable au lieu du Dieu-Amour et Dieu-Bonté dont les pages de l’Évangile sont remplies. La terreur chez eux, qui a remplacé l’amour, les a rendus incapables des grands élans nécessaires à se sortir de l’abîme où ils s’étaient enfoncés.

« Au delà des visages » est une œuvre marquante ; M. Giroux est un écrivain authentique. Sa peinture des milieux que, par euphémisme, on appelle « bien-pensants », nul ne l’a réussie mieux que lui ; il manie l’ironie avec une aisance parfaite, une ironie froide, celle qui fustige sans pitié. On citera en exemple son éditorial du « Bon Combat » qui est un chef-d’œuvre du genre : c’est tellement véridique qu’il ne serait pas étonnant que plusieurs aient pris sa charge pour argent comptant.

Dans « Le Gouffre a toujours soif », Giroux varie sa technique, tout en demeurant le grand