Si on feuillette les journaux du commencement du siècle dernier, depuis « Le Canadien », fondé en 1806, on est étonné de la forme excellente, nullement empesée des articles qui s’y publiaient, la presse d’alors avait de la couleur et on y défendait des idées ; le Canada français, bien plus qu’aujourd’hui, avait un journalisme digne de ce nom. Les discours des tribuns, des Papineau, d’un de Lorimier et, plus tard, d’un Lafontaine, dénotaient déjà une maturité de pensée traduite dans une langue pleine de saveur. Dans ce genre, les Canadiens se sont immédiatement exprimés dans une forme dégagée, une forme supérieure à celle dont ils se serviront dans les premières manifestations de leur littérature dite gratuite. Est-ce parce que l’art oratoire et le pamphlet offre plus de facilités naturelles ? Peut-on invoquer l’hérédité française ou, encore, ce que Léon Daudet appelait « les universaux » ? Nous dirons, plus simplement, que nous sommes en présence du désir manifeste d’une nationalité à réclamer, face à l’occupant, ses droits à l’existence.
Mais à la longue, par-dessus mers et continents, les idées électrisantes de ’89 ont fini par percer le double rideau clérical et britannique, véritable rideau de fer avant le terme, tombé entre le Canada français et le reste du monde. Sans